lundi 24 juin 2013

L'impossible casting de l'Europe

La meilleure idée de l'Union européenne de ces dernières années risque de devenir très vite la pire: obliger les partis à se structurer en partis européens pour offrir un visage UNIQUE et un programme dans toute l'Europe afin de motiver les électeurs européens à aller voter en toute connaissance de cause...

Une bonne idée, à bien y regarder, dictée par les très mauvais résultats en termes de participation de ces dernières années (43% en 2009), due en partie à la désaffection croissante des ressortissants des Etats membres vis-à-vis de cette Union européenne qui oblige leurs dirigeants à ne pas trop dépenser et en partie à la quasi-impossibilité de savoir pour qui l'on vote au moment où l'on vote...

Du coup, chaque courant politique européen est invité à faire émerger son leader avant Noël.

Ras-le-bol de Barroso?

A droite, après deux mandats, le Portugais José Manuel Barroso fait l'objet d'un "traitement de faveur" du gouvernement français en ce moment, entre les déclarations de François Hollande qui égratigne les propos du président de la Commission européenne sur l'exception culturelle et du ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, qui fait d'une pierre deux coups: affaiblir la Commission encore plus et flirter avec la gauche de la gauche...

Le PPE, la mouvance de M. Barroso, au Parlement européen présentera-t-elle le Portugais pour un troisième mandat? Pas sûr tant son dernier mandat a fait l'objet de tractations politiques et nationales. Trois Premiers ministres seraient dans les clous, Donald Tusk le Polonais, Jyrki Katainen le Finlandais ou encore Fredrik Reinfeld le Suédois. Deux autres noms sont régulièrement avancés: celui de la Luxembourgeoise Viviane Reding et du Français Michel Barnier.

Deuxième groupe politique en importance, les sociaux-démocrates semblent rangés derrière celui qui a pris la deuxième partie du mandat de la présidence du Parlement européen, Martin Schultz. Seulement l'Allemand n'a jamais dirigé de pays ni même été ministre et il est à peine assez connu dans son propre pays, alors imaginez dans les autres... Qui plus est l'Allemagne est à la fois la locomotive économique de l'Europe et son principal chiffon rouge de ceux qui s'excitent contre la rigueur imperturbable de la chancelière allemande... Derrière lui, mystère sur qui pourrait se glisser dans la peau d'un outsider.

Seul camp qui semble pouvoir bénéficier d'un nom qui veut dire quelquechose, les libéraux devraient profiter de la notoriété communicative de Guy Verhofstadt. Mais en 2004, soutenu par les deux grands, l'Allemagne et la France, il n'avait pas résisté au "no" ferme des Britanniques et de leurs alliés. Cette fois-ci, un autre problème se pose: un autre libéral, le Danois Anders Fogh Rasmussen, actuel secrétaire général de l'OTAN, entendrait succéder au président du Conseil de l'UE, Herman Van Rompuy.

Du coup, comme les Verts vont devoir se passer de leur charismatique leader, Daniel Cohn-Bendit, la course à la présentation d'un candidat unique par courant politique risque fort de devenir très compliquée et de donner lieu à bien des déceptions au moment où les nationalistes veulent déjà croire qu'ils seront les grands vainqueurs des futures élections européennes.

Les Le Pen déjà divisés...

A bien y réfléchir, cela relève aussi du croquignolesque: que des leaders dans leur pays défendent la priorité nationale, voire plus si affinités avec les pires relents historiques, soient obligés de se mettre d'accord avec autant de représentants du même courant qu'eux, chacun dans leur pays pour peser à la Commission européenne ou au Parlement européen...

Remarquez, ce ne sera pas le plus drôle pour les partis d'extrême droite. Marine Le Pen passe son temps à s'en prendre à l'Union européenne et à zapper le Parlement européen où elle est pourtant élue, se contentant en tout et pour tout d'empocher son salaire de députée européenne. L'entendre se réjouir de peser sur les prochaines élections européennes pour en faire un référendum anti-européen a quelque chose de grotesque, non?

Et pendant ce temps-là, la petite dernière de la famille avance en contestant sa tata, la renvoyant au statut de has-been... Marine Le Pen va aussi devoir affronter la levée de son immunité diplomatique au Parlement européen, ce qui lui permettra de jouer son rôle de martyr...

L'autre calcul des libéraux

Mais derrière le nom du vainqueur, d'autres ont déjà compris le problème qui viendrait d'un vote "nationaliste" à l'occasion des européennes de mai prochain: pour l'instant, les deux formations principales se sont toujours entendus pour parvenir à réunir 62% des députés européens, le seuil pour la majorité dans la procédure de codécision. Sans cette base, le Parlement européen deviendrait ingouvernable dans la durée...

D'ici le 19 décembre, les candidats doivent sortir du bois pour afficher leurs prétentions avant que les chefs d'Etat ou de gouvernement tranchent. Et si ça bugue, une primaire aura lieu avant février 2014, laissant trois mois au vainqueur de chaque camp pour battre campagne dans une Europe en pleine déconfiture...

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